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La crise sanitaire a-t-elle engendré le modèle d’entreprise-providence ?

La Seconde Guerre mondiale a généré le modèle de l’État-providence ; la crise sanitaire celui de l’entreprise-providence. Telle est la théorie de Raphaël Llorca, doctorant à l’EHESS et planneur stratégique à Havas Paris. Son idée de l’entreprise-providence a été largement relayée par les médias, notamment par l’Express qui, en pleine pandémie, publiait des extraits de son analyse. Voici leur teneur. 

État-providence et entreprise-providence : des définitions qui s’entremêlent 

« État-providence :  forme d’État qui intervient activement dans les domaines social et économique en vue d’assurer les prestations aux citoyens ».

L’État-providence est une forme de gouvernance qui revendique une présence renforcée dans certains pans de la vie des citoyens, dans le but d’assurer leur protection et leur bien-être. Résultante directe de la Seconde Guerre mondiale, véritable philosophie politique, l’État-providence a façonné notre modèle de société actuel : les politiques de prévention routière et de sécurité alimentaire, par exemple et bien sûr, notre système de protection sociale. Aujourd’hui, le modèle d’État-providence est si profondément ancré dans notre société qu’il aurait entraîné dans son sillage le fonctionnement même des entreprises. Les experts parlent d’un basculement de l’État-providence vers l’entreprise-providence.

« Entreprise-providence : modèle d’entreprise qui intervient dans les domaines qui relèvent habituellement de l’État-providence, aux côtés de celui-ci ou en substitution. »

Toutes les entreprises ont été providence pendant la crise sanitaire

D’aucuns diront que l’entreprise-providence est une expression tendance tout droit sortie de la crise de la Covid-19. Ils n’ont pas tort. Dès le début de cette période, nous avons vu l’État renforcer ses interventions (économie protection sociale, prévention sanitaire…), mais nous avons également constaté le renforcement de la présence des entreprises, directement dans la gestion de l’épidémie. Durant le confinement, « être utile » a été le slogan entrepreneurial, à défaut de « faire de la croissance ». Par exemple, LVMH a transformé ses usines de production de parfum en usines de fabrication de gel hydroalcoolique. Air Liquide, PSA, Valeo et Schneider Electric ont réuni leurs forces de production pour sortir 10 000 respirateurs de leur chaîne en moins de 50 jours. Pendant le confinement, le groupe hôtelier Accor a offert des nuitées aux soignants et aux personnes sans domicile fixe. Intermarché a vendu des produits frais à prix coûtant pour aider les agriculteurs français. Citons plus largement les TPE et les PME françaises, les premières à s’engager dans la protection sanitaire de leurs effectifs à coup de distribution de masques et de gel ; les premières à réorganiser leurs processus pour éviter le licenciement et la baisse des salaires.  

L’entreprise devient providence quand elle s’éloigne de son objet marchand

Tous ces exemples mettent en exergue le modèle d’entreprise-providence tel qu’il est avancé par les experts : un modèle qui s’éloigne de son objet marchand – l’essence et le fondement même de l’entreprise – pour devenir protecteur de la santé et/ou de la vie économique de la société, au même titre que l’État, et même en substitution de l’État (quand Chanel refuse le dispositif de chômage partiel tout en maintenant les salaires à 100 % via ses propres fonds – quand L’Oréal lance un plan de solidarité auprès de l’ensemble de sa chaîne de valeur…). 

Au final, depuis le début de la pandémie, chacun de ces acteurs économiques s’est rapproché, à son niveau, de l’essence même de l’État-providence, d’un « système d’organisation assurant à chaque membre de la communauté la protection qui lui est due en même temps qu’elle procure, à toutes et à tous, les conditions les plus avantageuses possible » (texte fondateur de l’État-providence issu du « Welfare State » du Oxford English Dictionary sorti en 1955).  

L’entreprise-providence : des mutuelles au poste de Happiness Chief Officer

Si le modèle de l’entreprise-providence se cristallise en temps de pandémie, il a émergé bien avant la crise sanitaire. En 2010, l’avocat et essayiste Nicolas Baverez introduisait l’expression en pointant le renforcement de l’implication financière des entreprises dans le modèle social français, via la démocratisation des mutuelles et des régimes de retraite complémentaire. 

Plus tard, la couverture de santé collective (obligatoire en 2016), la cotisation chômage payée par l’employeur et l’État (la part salariale de la cotisation a été supprimée en 2019), ont renforcé cette image de l’entreprise investie dans la protection universelle au détriment de sa pleine profitabilité. 

Outre le volet social, nous pourrions également associer à l’entreprise-providence les actions menées pour améliorer le bien-être dans le monde professionnel, comme le suivi d’indices de bien-être, l’avènement du poste de Happiness Chief Officer, la création de l’expérience collaborateur, allant bien au-delà des basiques : conditions saines – juste rémunération – recherche de profit. 

Entreprises et État au même niveau de service : est-ce dangereux ?   

On constate que, petit à petit, les entreprises glissent vers le positionnement d’entreprise-providence. On constate que, petit à petit, les citoyens attendent de l’entreprise qu’elles s’investissent dans leur santé, leur avenir et leur épanouissement personnel.  

In fine, le paradigme dans lequel l’entreprise se place au même niveau que l’Etat pour répondre au besoin de protection et de bien-être de la population s’ancre dans nos mentalités.  

Est-ce un modèle exemplaire de société ? Les entreprises seront-elles à même de se placer aux côtés, voire en substitution de l’État, avec la même force objective et universelle ?  Par ricochet, faut-il laisser l’État devenir simple acteur parmi d’autres sur « un marché de la protection », comme le définit le doctorant Raphaël Llorca ?

C’est là tout le mystère qui entoure le modèle d’entreprise-providence sur le long terme.  « La capacité des entreprises à garantir des lois universelles autres qu’économiques et marchandes reste encore à prouver », conclut la thèse.  

71 % des Français comptent sur l’entreprise pour assurer leur bien-être

Dans l’enquête « Pandémie et responsabilité d’entreprise » menée pour le Cercle de Giverny au mois d’avril 2020, 85 % des Français estiment que « les entreprises peuvent se substituer à l’État en toute légitimité dans des situations pratiques comme « proposer du matériel médical » (84 % des répondants), « faciliter certaines démarches administratives » (72 % des répondants) ou encore « informer précisément sur la situation sanitaire en cours » (61 % des répondants).  
Avant le confinement, en mars 2019, 71 % des Français estimaient que « les entreprises [contribuent] de manière plus décisive que les gouvernements à améliorer concrètement [leur] quotidien » (enquête menée par Havas Paris). 

Sources : 

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